Etant lyonnais et professionnels de la maîtrise d'œuvre, nous entendions beaucoup parler du Village Vertical depuis sa livraison en 2013. Nous avions déjà lu différentes choses sur cette première coopérative habitante française, mais nous étions curieux d'entendre les témoignages des habitants. C'est en avril dernier que nous nous nous y sommes rendus pour la première fois, à l'occasion d'une rencontre organisée par Habicoop.

 

LA PREMIERE COOPERATIVE D'HABITANTS

Le Village Vertical est sorti de terre à Villeurbanne en 2013, après 8 longues années de travail, de création du groupe, de recherche de foncier et de banques, de réflexion sur la forme, de réunions de conception, de négociations avec la mairie, le bailleur, l’architecte, les entreprises… Oui, l’habitat participatif, ça prend du temps !

Aujourd’hui, 14 familles vivent dans cette coopérative, au fonctionnement particulier : tous sont collectivement l’unique propriétaire de l’immeuble mais chacun est locataire de son appartement. Plus précisément, une coopérative a été créée et détient l’immeuble. Chaque foyer possède un certain nombre de parts sociales dans cette coopérative, ce qui donne droit à une voix. Ces parts sociales représentent la somme d’argent apportée au départ par chaque habitant. Si un foyer souhaite déménager, il doit revendre ses parts sociales à un futur habitant, sans plus-value possible. Il récupérera la même somme qu’engagée au départ, majorée du coût de la vie. Toute spéculation immobilière est gelée par ce biais. Tous les mois, les habitants versent un loyer à la coopérative. Ces loyers servent à rembourser l’emprunt généré par la coopérative pour construire l’immeuble, à gérer les besoins au quotidien et à approvisionner un fond en cas de besoin (travaux, réparation etc.). Au moment de notre visite, un appartement était vacant et les propriétaires en période de recrutement. Des entretiens sont organisés pour les prétendants afin que ceux-ci soient cooptés par les habitants

 

DES INTENTIONS A LA FORME

La grande particularité du village vertical réside dans son montage financier et le découpage physique qui en résulte. En effet la coopérative d'habitants s'est associée à la coopérative HLM Rhône-Saône Habitat. Ainsi un des 3 volumes qui constituent le bâtiment est réservé à du logement locatif social. Ce  sont dans les rez-de-chaussée de la partie de la coopérative habitante que se trouvent les espaces collectifs : il s’agit d'une salle commune aux allures de grand appartement, destinée notamment à l'accueil des réunions de la coopérative, ainsi que d'une buanderie, un local vélo et une chambre d'ami. Celle-ci permet à tout membre de la coopérative, en fonction du calendrier et des demandes de chacun, de recevoir ses proches sur place. La salle commune donne sur des espaces verts collectifs et un jardin potager partagé en cours de création. Il a toujours été dans l'intention de la coopérative d'être un véritable acteur de la vie de quartier. Elle se fait donc le relais de l'AMAP l'arbralégumes

l'arbralégumes et espère pouvoir accueillir d'autres activités à l'intention de tous dans sa salle commune.

Le bâtiment est conçu en bande, les logements étant tous orientés au sud et accessibles au nord par des coursives extérieures. Si celles-ci permettent aux appartements d'être traversant et de bénéficier des vents dominants Nord-Sud pour se rafraîchir en été, elles deviennent surtout des lieux de rencontre et d'échange. Elles sont en effet en bois apparent et offrent des surfaces généreuses, particulièrement aux abords des escaliers. Elles peuvent être aisément appropriées par les habitants.

Du point de vu constructif, le Village Vertical est un projet exemplaire. La structure principale est en poteaux, poutres et planchers béton. Les coursives sont en structure bois. Les façades sont réalisées entièrement en ossature bois. Voilà un bel exemple d'association bois et béton encore rare en France. Grâce à l'ossature bois, de grandes surfaces de panneaux photovoltaïques, un récupérateur d'eau de pluie, une pompe à chaleur couplée à une chaudière à granulats, le bâtiment surpasse les critères du label BBC pour un coût de construction de 1147€/m² de SHON! (Le coût moyen de construction en France pour ce type de projet étant, selon l'ADEME, de 1200€/m² de SHON.)

 

L'IMPORTANCE DE L'ACCOMPAGNEMENT

L’association qui organisait la présentation de ce projet était Habicoop, structure qui aide les groupes d’habitants à se constituer, à réaliser leur projet et qui a grandement participé à la rédaction du statut légal des coopératives. Dans le public de cette petite conférence-débat, se trouvait une majorité de personnes intriguées par l’habitat participatif, à la recherche d’informations ou d’un projet à intégrer, ainsi que quelques professionnels. La présence de ces derniers a amené un débat intéressant et assez contrasté. Certaines personnes voient d’un très mauvais œil le développement dans le secteur immobilier classique de projets d’habitat participatif « clé en main ». Des promoteurs, sentant la tendance, proposent des immeubles avec des parties communes importantes et des espaces de partage. Le processus de création par les habitants est court-circuité au profit du résultat final. D’autres au contraire y voient la création d’un large éventail de possibilités pour tous de choisir selon ses envies et sa capacité à s’engager dans la montagne de travail que représente un habitat réellement participatif.

 

DE L'AUTRE COTE DU CALQUE

Ce projet a été conçu par l'agence d'architecture Arbor & Sens, et plus particulièrement Marine Morain, architecte enseignante et chercheuse au sein du réseau Leroy Merlin Source. Celle-ci développe depuis plusieurs années une réflexion que ce projet lui a sans doute permis de mettre en application. Nous la rencontrerons prochainement pour recueillir ses impressions...

 

A SUIVRE...